Lamprichthys tanganicanus

Lamprichthys tanganicanus

Lamprichthys tanganicanus ( Boulenger,1898)

(Pisces, Cyprinodontiforme, Poeciliidae, Aplocheilichthyinae)

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Expérience aquariophile

Auteur: Denis Jeandel   AFC 394/54

– 2002 –

Lamprichthys tanganicanus.

Origine de son nom :

Lamprichthys vient du grec lampros « avec éclat »

ichthys = « poisson »

tanganicanus = Tanganyika

Classification

Ordre des Cyprinodontiformes

Famille : Poeciliidae

Sous famille : Aplocheilichthyinae

Genre : Lamprichthys

Espèce : tanganicanus

Boulenger  décrivit cette espèce en 1898 à partir d’un individu unique de 80mm LT , rapporté au genre Haplochilus .

Lamprichthys a été défini par Regan en 1911 . En 1936, David décrivit une autre espèce du genre: Lamprichthys curtianalis . La description fut réalisée à partir d’exemplaires femelles de Lamprichthys tanganicanus, l’origine de cette description est sans doute le dimorphisme qui existe entre mâle et femelle bien que ce caractère soit fréquent chez de nombreux Cyprinodontidés . Le genre Lamprichthys est donc bien monotypique.

La localité typique est « Mbity rocks » à l’extrémité sud du Tanganyika, le type est conservé au British Muséum.

Description:(d’après l’original)

Corps comprimé, relativement un peu moins haut chez le mâle que chez la femelle (3,65-4,66 et 3,94-4,23 fois dans LS) ; museau acuminé, plus long que le diamètre de l’œil ; bouche terminale, protractile(planctophage).

(… …)

Espace pré orbitaire égal à ½ du diamètre de l’œil (mâle) ou au 2/5 (femelle).Lamprichthys description.

(… …)

41-44 écailles en ligne longitudinale, 21-23 autour du corps en avant des pelviennes, 10-12 autour du pédoncule caudale.

(… …)

D.13-17 (mâle), 14-16 (femelle), opposée à l’anale, son origine au dessus des 11-13ème rayon de l’anale, plus longue et plus basse  chez le mâle que chez la femelle ; comme la dorsale, elle est plus longue et plus basse que chez la femelle. P . atteignant la moitié ou les ¾ des pelvienne. V . n’atteignant  généralement pas l’anus. Bord postérieur de la caudale légèrement concave, à coins aigus.

(… …)

COLORATION ― Mâle : Dos vert olivâtre plus ou moins foncé avec, de part et d’autre de la ligne médiane, une ligne brillante bleu vert, faite d’une série de taches bleues chacune au centre d’une écaille. Région latérale et ventrale argentée. Chaque écaille étant ornée d’une tache d’un bleu azur étincelant, l’ensemble des taches formant des rangées longitudinales plus ou moins rectilignes au nombre de 7 ou 8. Dorsale et anale présentant respectivement 5-6 et 4-5 rangées longitudinales de taches arrondies ou allongées, de couleur jaune ocre clair, et bordés d’un liseré de la même couleur. Caudale à marge postérieure et à pointes jaune ocre, sa région basilaire finement ponctuée de bleu. Pectorales légèrement teintées ; ventrales à bordure ocrée bien nette.

Mâle Lamprichthys.

Femelle Lamprichthys.Femelle : coloration généralement beaucoup moins bleue (points bleus moins nombreux et limités à la région dorsale) ; peu de jaune sur les nageoires.

Remarque:

Selon Sterba en 1987,  les individus importés seraient plus vivement colorés que les individus nés en captivité. Nous laisserons à Sterba cette affirmation très contestable du fait de l’observation d’individus nés en captivité chez certains amateurs.

TAILLE :La longueur maximale des mâles est de 14 cm, elle est de 11 cm pour les femelles.

Le biotope:

   Les éboulis rocheux, les enchevêtrement de galets, les failles rocheuses constituent tout autour du lac le biotope de ce bijou flamboyant,  absent des zones sablonneuses. Toutefois on l’a observé jusqu’à 100m du rivage dans une anse du sud de la baie de Tembwe (Poll 1953b).

Lamprichthys tanganicanus est un poisson de pleine eau dans une profondeur n’excédant pas 10m, les femelles ayant tendance à rester à  proximité du fond pour s’y reproduire (Genevelle 2002) Il est à noter que le mâle Lamprichthys tanganicanus est très territorial, il faudra tenir compte de cette caractéristique dans le maintien de l’espèce en aquarium.

Alimentation:

Planctophage, Lamprichthys est glouton, son contenu stomacal  analysé renferme des petits crustacés, des débris d’insectes, des micros-organismes et même des écailles de poissons. Cette information est essentielle pour l’éleveur qui pourra proposer toutes sortes de nourriture, les adultes sauvages acceptant très rapidement la nourriture en flocons. Mais, détaillons ce qui a été proposé dans le cadre de notre élevage. En alimentation congelée, nous avons proposé Artémia salina, Mysis , Krill, broyât de crevettes grises décortiquées, Daphnies et Cyclops. En alimentation vivante, les nauplius d’Artémia salina, les cyclops et les daphnies provoquent une véritable frénésie dans les bacs d’élevage. Comme nous l’avons signalé et bien qu’elle n’ait été proposée qu’à titre expérimental, la nourriture en flocons est acceptée sans difficulté.

Aquariologie:

Avant de présenter l’aménagement de l’aquarium de maintenance, regardons un peu en arrière et voyons comment Lamprichthys tanganicanus est arrivé jusqu’à nous et laissons parler les pionniers .

   Max Poll : « le plus joli poisson d’aquarium du Congo belge que nous connaissons… son importation nous semble un objectif très désirable » 1953a.

   Les premiers spécimens vivants furent introduits en Europe et au U.S.A en 1959 par la firme Aquarium Hambourg, à la suite du voyage de son propriétaire W. Griem, en Afrique orientale (supplément à la revue française d’aquariologie n°2/89).

   Notre hôte est un poisson fragile et si, après acclimatation, son maintien n’est pas très difficile, il est quelques règles à respecter et en premier lieu, les qualités physico-chimiques de l’eau. Notre propos n’est pas de détailler ni même de recopier les différents paramètres des eaux du lac Tanganyika: une formule est utilisée avec succès depuis des années au Muséum aquarium tropical de Nancy, « je l’utilise depuis plus de quinze ans pour le maintien d’espèces fragiles ou l’acclimatation de poissons sauvages ».

Cette formule qui peut-être préparée en pharmacie, s’utilise dans la proportion de 0,30 g par litre d’eau déminéralisée :Sulfate de magnésium 200g

  • Bicarbonate de magnésium 250g
  • Carbonate de sodium 350g
  • Chlorure de potassium 150g
  • Carbonate de lithium 20g
  • Silicate de sodium 30g

Remarque : Certaines officines demandent une ordonnance pour la délivrance du carbonate de lithium, d’autre part, le mélange du silicate de sodium demande un coup de main particulier pour ne pas agglomérer la préparation.

   La seconde exigence de Lamprichthys tanganicanus est la taille du bac, ” éternelle question ” (Genevelle 2002), comme ce spécialiste, nous dirons, le plus grand possible, pour l’élevage et le maintien, en règle générale un volume de plus de 600L permet de maintenir 2 mâles et un groupe de femelles. Le mâle est très territorial, dans un volume inférieur à 400L, il est déconseillé d’introduire plusieurs mâles. Afin d’optimiser les pontes, l’option d’un bac spécifique peut-être envisagé, la photo nous montre un bac de 400L où sont maintenus 30 femelles avec 1 mâle.

Aquarium Lamprichthys.

Si l’éclairage solaire direct permet une explosion des couleurs, l’utilisation combinée de tubes fluorescents de spectre différent nous permettra d’apprécier la brillance de l’argenté des femelles et l’intensité du bleu azur des mâles.

Reproduction:

« Il n’y a pas de saison de reproduction chez cette espèce » (Genevelle 2002).

    Poll (1953 b) a pu observer les pontes en milieu naturel, sans interruption d’octobre à mai.

   La reproduction en aquarium est maîtrisée depuis de nombreuses années, les observations ont permis d’en préciser les différentes étapes.

   Notons tout d’abord qu’il n’y a pas de moment privilégié, est ceci est bien vérifié dans notre bac spécifique présenté en photo, dans lequel, les femelles, nombreuses, frayent à tout moment du jour.

   Le mâle prend l’initiative de la ponte, il va entraîner une femelle gravide vers un site choisi (en général une faille). Cette phase particulièrement démonstrative est pour l’observateur un moment de plaisir visuel : en effet le mâle toutes nageoires déployées est comme agité de tremblements, effectuant des tourniquets autour de la femelle, et guide cette dernière vers la faille définie. La femelle présente sa région génitale vers l’endroit le plus profond de la faille. L’expulsion des œufs et leur fécondation a lieu alors que le mâle semble étreindre la femelle dans une courbure en S . Les œufs très durs, translucides, d’environ 3mm de diamètre, isolés ou en petit groupe adhèrent à la paroi rocheuse. Les œufs non fécondés, ont une couleur laiteuse qui vire au blanc floconneux en quelques jours. Après l’expulsion des œufs, la femelle quitte le site de ponte. Si le bac de reproduction n’abrite pas de prédateurs naturels des œufs de Lamprichthys tanganicanus (Mastacembelidae, quelques Lamprologiens) le développement larvaire se déroule sur 3 semaines. L’observation microscopique nous montre l’évolution des cellules puis de la larve.

Oeuf Lamprichthys (dévelloppement1).

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STADE 1
3 jours après la ponte, l’œuf est transparent, le grossissement de droite montre une cellule déjà bien différenciée.

Oeuf Lamprichthys (développement).

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Oeuf Lamprichthys (embryon).

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STADE 2.
10 jours après la ponte, l’organisation cellulaire est maintenant bien visible, le grossissement de droite laisse entrevoir le positionnement de la future larve.
  

Oeil d'alevin de Lamprichthys

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Oeuf Lamprichthys détail (tête).

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STADE 3
La larve est formée, enroulée dans l’œuf, on distingue nettement les yeux (photo 1), la région ventrale (photo 2), et l’épine dorsale( photo 3).

Oeuf Lamprichthys détail (abdomen).

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Oeuf Lamprichthys détail (pédoncule caudal).

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Nous savons maintenant tout sur la parade amoureuse, essayons d’envisager les différentes techniques afin de stimuler le reproducteur, de concentrer la quantité œufs émis et de faciliter la récupération de ces derniers.

Le bac nu:
Cette technique est à citer mais n’est plus utilisée aujourd’hui ; la technique consistait à recouvrir le fond d’une cuve d’un sable très fin et d’introduire des reproducteurs. Après quelques jours on tamisait le sable de surface afin de récupérer les œufs qui étaient ensuite placés dans un récipient pour l’incubation. La méthode peut être utilisée pour des individus sauvages ou issus d’élevage. Les inconvénients de cette technique se trouvent dans  la manipulation fastidieuse de filtration du sable pour la récolte des œufs mais également le stress des poissons lors des interventions dans le bac.


     Le mops
:

Les amateurs de killies connaissent et utilisent cette technique pour la récupération des œufs. Le mops est constitué de fils de laine reliés à un bouchon de liège ou à un morceau de polystyrène pour assurer la flottaison. (photo 8). La laine synthétique sera préférée à la laine naturelle car elle évite une perte de fibres dans le bac de reproduction. Avantages: il n’y a pas de stress des poissons, le retrait du mops est rapide, la récupération des œufs est très simple, ces derniers étant adhérents à la laine.

     Inconvénients:

La ponte sur le mops avec des individus sauvages est impossible, avec des adultes issus de l’élevage la ponte a lieu mais la quantité des œufs est peu importante.

Mops.

ph.8.

   Le site artificiel de ponte : C’est à notre avis la solution la plus adaptée à une production optimale, une récolte simplifiée, et une possibilité d’observation de la parade amoureuse. Deux artifices peuvent être utilisés, le second étant une amélioration du premier:

A )  Un petit récipient  plastique dans lequel des ardoises sont arrangées à la façon des strates, est disposé dans un coin de l’aquarium. (photo9).

Inconvénient : Lors de la remontée du récipient pour la récupération des œufs, la turbulence créée par le mouvement décolle les œufs, les met en suspension, et un nombre important tombe dans l’aquarium.

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ph.9.

B )  La construction d’un récipient de même type que précédemment mais dont le fond est percé de nombreux petits trous permet d’éviter les inconvénients cités ci dessus (photo 10). Si la turbulence n’est pas évitée, l’eau attirée vers le fond du récipient entraîne avec elle les œufs qui seront récupérés ensuite.

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ph.10.

   Les œufs récupérés sont mis au bain-marie pendant 3 semaines en attendant l’éclosion, quelques cm d’eau dans un récipient placé en flottaison dans un bac chauffé et l’attente commence, l’observation du développement est bienLamprichthys (alevins de 2 mois et demi). visible au travers de l’enveloppe. A la naissance, les alevins mesurent 1mm de long, très foncés, ils ressemblent à de petites virgules qui se déplacent très rapidement de façon désordonnée. A ce stade ils se manipulent sans danger, nous les transférons donc dans un bac de grossissement, ils seront nourris souvent et les changements d’eau seront fréquents ; la croissance sera d’environ 1cm par mois pour atteindre une maturité sexuelle en 6 mois. La nourriture des premiers jours sera importante puisque les nauplius d’Artémia ne sont pas acceptés, micro-vers, anguillule du vinaigre et nourriture sèche très fine (100µ) Lamprichthys (alevin de 2 mois).constituent l’essentiel de l’alimentation avec une préférence à l’anguillule du vinaigre qui reste bien en suspension en milieu liquide alors que les µ vers et la nourriture sèche ont tendance à tomber sur le fond.

Remarque : Le sex-ratio est déséquilibré en faveur des femelles, selon M. Tarall il semblerait qu’une température plus basse favorise la production  de mâle. Une expérimentation  démarre en septembre de cette année pour vérifier cette hypothèse, les résultats vous seront précisés.

Maladies:

Lamprichthys tanganicanus acclimaté n’est pas particulièrement sensible aux maladies, la fragilité des téguments constitue le risque majeur de pathologies car les poissons blessés présentent des risques de mycose.   Il est à signaler un point de fragilité important touchant essentiellement les Lamprichthys tanganicanus dont la taille se situe entre 40 et 60mm, lors de la capture à l’épuisette le stress induit chez certains individus une pliure du corps qui prend un aspect incurvé, la mort survient immédiatement ou peu de temps après. Nous avons observé des individus gardant cette courbure latérale plusieurs jours avant de mourir. ” Il est donc très risqué de mettre plusieurs individus par sac de transport, un poisson qui stresse rejette des toxines qui pourraient tuer les autres poissons du sac.” (E. Genevelle 2002).

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BIBLIOGRAPHIE

Condé (B.) –Louisy (P.) – Tarall (M.) 1989/1990 Lamprichthys tanganicanus

-Supplément à la revue française d’aquariologie n° 2/89

      -Supplément à la revue française d’aquariologie n° 4/89

      -Supplément à la revue française d’aquariologie n° 2/90

Genevelle (E.) 2002 La flèche bleue du Tanganyika Cahier Aquarama 2002-4

Poll (M.) 1953 b poissons non cichlidae Exploration hydrobiologique du lac Tanganyika (1946-1947)

Richter (H.J.) 1987 Lamprichthys tanganicanus le kili perlé du lac Tanganyika Aquarama n° 93

 

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