Chalinochromis brichardi Poll, 1974

Expérience aquariophile
Auteur: Estelle
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![]() Description: Cette espèce, découverte par Pierre Brichard en 1971 près de Nyanza, a été décrite par Max Poll en 1974, qui lui créa également un nouveau genre. Elle porte le nom de son découvreur, et on prononce donc « brichardi » comme « cheminée » (et pas « briKardi ») pour respecter le nom propre dont il est issu, comme c’est le cas pour tous les noms scientifiques donnés en l’honneur d’une personnalité. Chalinochromis brichardi est un beau poisson au corps allongé comme les Julidochromis, et sa couleur générale est beige crème. Dans le lac, il se nourrit principalement d’éponges. Adulte, il mesure environ douze centimètres. Ses caractéristiques les plus frappantes sont les trois bandes noires céphaliques qui lui ont valu son nom de genre: ce dernier vient du grec χαλινός ( chalinos : le mors, la bride ) en référence à son masque qui ressemble à un harnais de cheval.
Les sujets âgés présentent une légère bosse adipeuse sur le front. Certaines populations possèdent une ou plusieurs taches noires sur la partie à rayons mous de la dorsale. Il n’y a pas de dimorphisme sexuel, si ce n’est la taille bien plus importante des mâles selon mes observations personnelles. Ils sont également plus massifs et moins élancés. Il est assez difficile de sexer Julidochromis et Chalinochromis car on n’assiste jamais à la ponte. Néanmoins, l’examen des papilles sur les adultes permet de distinguer nettement deux types: celle de la photo (le mâle), et une autre bien plus large mais sans relief (la femelle). Chalinochromis brichardi se rencontre dans toute la partie nord du lac. Un phénomène étrange: on trouve d’autres espèces de Chalinochromis dans les régions centrales du lac. Les livrées de ces poissons adultes correspondent à deux stades du patron de coloration du jeune Chalinochromis brichardi : l’alevin, qui naît rayé, a ensuite deux lignes horizontales noires sur les flancs, qui disparaissent progressivement si bien qu’à un stade de la croissance, elles ne sont plus que des rangées horizontales de gros points noirs. Il devient ensuite totalement uni. Alevin Chalinochromis brichardi âgé de 4/5 mois ( 2.5 cm ) Le Chalinochromis popelini présente le premier patron, deux lignes longitudinales noires, et le Chalinochromis sp. “Ndobhoi” ( espèce encore non décrite ) le second patron de taches sombres. Chalinochromis sp. “Ndobhoi” Chalinochromis sp. bifrenatus |
Conseils de maintenance:On ne mélangera pas différentes espèces de Chalinochromis dans un même bac pour éviter l’hybridation. De même, il semble plus prudent d’éviter la cohabitation avec les Julidochromis, qui sont très proches tant sur le plan du comportement que de la morphologie. Chalinochromis brichardi est un cichlidé pétricole, qui vit dans les zones rocheuses du lac. L’aquarium qui l’accueillera sera donc bien empierré, lui offrant de nombreuses failles et anfractuosités où il aime circuler dans toutes les positions, parfois même à l’envers, ou observer immobile les alentours, avec seulement la tête qui dépasse de la roche… 200 litres est un volume minimum pour cette espèce où mâle et femelle n’ont pas forcément le même territoire, et où le couple n’est soudé qu’en période de reproduction. Pour les faire cohabiter avec une autre espèce, je conseille un plus grand bac ( 300 litres et plus ) car lorsque les alevins pointent le bout de leur nez, Chalinochromis brichardi n’est pas facile à vivre… |
Expérience de maintenance:
Mon premier cichlidé du Tanganyika, celui pour qui j’ai abandonné le Malawi et qui reste mon poisson préféré.Après en avoir beaucoup rêvé, j’ai acquis quatre spécimens juvéniles qui furent les premiers habitants d’un 200 litres. Entre cinq et sept centimètres, ils étaient très pâles, presque blancs.
Les deux poissons se jaugent, se rapprochent doucement et soudain, ils se jettent vivement l’un sur l’autre et s’affrontent bouche contre bouche. Puis ils s’éloignent tels deux chevaliers médiévaux lors d’un tournoi, font demi tour et se font face à nouveau… et le jeu reprend. La hiérarchie étant installée, elle ne les empêche pas de se “courser” régulièrement, et le dominé est parfois remis à sa place assez violemment par le dominant. Au bout de quelques semaines, le mâle dominant se mit à harceler les deux plus petits, tout en acceptant dans son territoire la présence d’une femelle. Je décidai donc de diviser le groupe et de ne garder que ce couple dominant. |
Comportement:
Le mâle montre qui est le chef et a tendance à “embêter” les autres espèces, même celles qui ne rentrent pas en concurrence avec elle au niveau de l’habitat. Le couple a d’abord cohabité avec un couple de Neolamprologus brevis et des Synodontis lucipinnis (ex sp. petricola “dwarf”). Le mâle Chalinochromis encore jeune allait régulièrement “visiter” le couple de brevis qui stationnait près de sa coquille dans un coin du bac, tournait autour de la coquille, et semblait provoquer gratuitement les deux petits conchylicoles qui tentaient bravement de le repousser. Les relations intra spécifiques ne sont pas meilleures tant que les couples ne sont pas formés, les femelles sont dominées et font profil bas. Mais les parades de soumission leur évitent relativement les morsures, car elles ne sont pas trop abîmées.
Chez moi, ils sont nourris aux paillettes végétales à la spiruline, qui leur donne en grandissant une belle couleur ambrée. |
Reproduction:
Adulte, Chalinochromis brichardi est par essence un poisson assez timide,qui prend facilement peur quand il y a du mouvement près du bac. Nos visiteurs sont souvent surpris de contempler un bac vide… Au moindre mouvement aux alentours ou dès qu’ils sont laissés seuls par leurs géniteurs, les alevins se collent au substrat, immobiles. Leur livrée les rend quasiment invisibles dans la nature. Dans mon bac, ils sont plus visibles car il est rempli de pierres de montagne d’un rouge sombre, sur lesquelles ils ressortent un peu. Les petits ont l’air assez vifs, et ils se jettent avec avidité sur la poudre de paillettes amenée par le courant. Ce n’est certainement pas un hasard, d’ailleurs, si la pierre qu’ils occupent est inclinée et placée sur la trajectoire du courant, c’est un vrai self-service! Le repas terminé, ils regagnent la sécurité de la grotte parentale, et échappent aux regards. Une inspection à la lampe électrique permet de les distinguer, collés à une paroi verticale ou au plafond de la caverne, sous l’oeil des parents qui se relaient.
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Référence: Les cichlidés du Tanganyika dans leur milieu naturel. Ad Konings. ( Cichlid Press )
Merci à Tim Nurse et Goupil pour leurs photos.