Tropheus duboisi , généralités/précisions…
Par Denis Jeandel
Article paru dans (Agora Troph N° 8), l’Agora Troph est le bulletin de liaison du GTroph.
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C’est en 1958 que Tropheus duboisi a été importé pour la première fois en Europe. Il ne survécut malheureusement pas longtemps. Les connaissances sur la maintenance de ce poisson étaient insuffisantes. Ce n’est que dans les années 1970 qu’il fut importé plus régulièrement. C’est sans doute grâce à la robe des juvéniles que Tropheus duboisi a connu un vif succès, il reste aujourd’hui très populaire et si autrefois les mélanges entre les spécimens de lieu de captivité étaient fréquents, aujourd’hui une connaissance plus précise des différents spécimens permet un maintien plus rigoureux des souches afin de conserver chez l’adulte un maintien de coloration fidèle à celui des spécimens types. |
Origine : Tropheus duboisi est endémique du Lac Tanganyika. Son habitat est le littoral rocheux du lac à une profondeur de 3 à 12 mètres, occasionnellement des jeunes se rencontrent en surface. Il semblerait donc que cette espèce vit à une profondeur plus importante que Tropheus moorii que l’on trouve plus volontiers entre 0.5 m et 3 m. Tropheus duboisi est une espèce moins fréquente que Tropheus moorii puisque la nourriture est moins abondante à la profondeur qu’il habite. |
La forme générale :
Nous ne nous attarderons que très peu sur la description de Tropheus duboisi l’essentiel étant relaté dans le document précédent, nous rappellerons simplement quelques points. |
Les différentes aires de répartitions :
Note : on ne trouve Tropheus duboisi que dans la partie Nord du lac. Aire de Bemba
Aire de Kigoma
Aire de Karilani
Aire de Maswa C’est la plus jolie de toutes les formes présentées. Une population de robes identiques est trouvée à Halembe, endroit situé un peu plus au sud de Kabogo. |
Le Tropheus duboisi dans son milieu naturel.
Bien que territorial, Tropheus duboisi se déplace régulièrement: son environnement ne lui permettant pas de trouver la quantité de nourriture suffisante de façon pérenne. On le trouve seul ou en couple, il partage son habitat avec d’autres espèces du genre A Bemba en compagnie de Tropheus sp black “Bemba” A Karilani en compagnie de Tropheus Brichardi “Karilani” A Kigoma en compagnie de Tropheus brichardi “Kigoma” A Maswa en compagnie de Tropheus brichardi “Karago”, Tropheus brichardi “Kabogo” et Tropheus brichardi “Halembe”. Tropheus duboisi vit dans des zones plus profondes que les autres espèces du genre, sa bouche est en position moins infère que les autres Tropheus, lorsqu’il broute, son corps forme un angle avec le substrat contrairement aux autres espèces du genre dont le corps est en position plus horizontale. Il n’y a donc pas de concurrence alimentaire entre Tropheus duboisi et les autres Tropheus avec lesquelles il vit en sympatrie. Ad Konings explique par contre que c’est peut-être à cause d’une concurrence alimentaire avec d’autres herbivores que Tropheus duboisi n’est présent que dans des localités bien précises et peu nombreuses. Si comme nous l’avons évoqué au début de l’article, les adultes se rencontrent à des profondeurs de 3 à 12 m, il est fréquent de trouver des jeunes Tropheus duboisi qui se nourrissent dans la partie supérieure de la colonne d’eau, entre 2 et 3 mètres. |
La reproduction : Tropheus duboisi est un incubateur buccal monoparental de type maternel. La ponte est sensiblement différente des autres espèces du genre, les reproducteurs ne se couchent pas sur le coté lors de l’émission de la laitance. Le nombre des œufs est peu élevé entre 9 et 12 en moyenne. Les œufs sont relativement gros et, plusieurs hypothèses sont avancées pour expliquer la taille : – Les œufs des Tropheus sont gros car la ponte a lieu dans des zones où la turbulence de l’eau est importante et cela permet à la femelle de récupérer l’œuf avant qu’il ne soit emporté dans la colonne d’eau. – Les œufs des Tropheus sont gros ce qui donnera des alevins de taille importante qui pourront ainsi échapper aux prédateurs, il n’y a en effet pas ou très peu de protection maternelle après le lâcher des alevins chez les Tropheus. -La taille des œufs est plus importante car le genre a évolué depuis très longtemps vers l’incubation buccale, au contraire, par exemple, de Gnathochromis permaxillaris qui peut avoir plus de 200 petits par ponte, les Tropheus en on rarement 20. Nous n’apporterons pas de réponse à ces hypothèses mais il nous semblait important de les évoquer. L’incubation dure entre 3 et 4 semaines; pendant l’incubation, les femelles se nourrissent en prenant de petites particules alimentaires, avec beaucoup de précautions. Lorsque les alevins sont libérés ils mesurent 8mm et sont aptes à rechercher la nourriture En cas de danger, ils peuvent être repris en bouche par la femelle mais ce n’est pas systématique et jamais au delà de quelques jours. La croissance est assez rapide, la maturité sexuelle est atteinte en moins d’une année. Nous noterons que les jeunes femelles incubent peu d’œufs et qu’il est possible d’avoir plusieurs échecs avant d’obtenir une première portée d’alevins. La coloration des jeunes: à la naissance, la livrée est gris sombre, elle va très rapidement évoluer vers cette robe tant appréciée des amateurs, noire jais parsemée des points blancs-bleutés, vers 5 cm chez les individus dominants, la coloration évolue pour atteindre la livrée définitive des adultes. |
Le maintien en aquarium :
Si nous prenons comme référence l’observation en milieu naturel, nous pouvons très bien maintenir Tropheus duboisi par couple. Si nous nous référons au genre nous pouvons les maintenir en groupe. Les deux choix fonctionnent et il n’y a pas plus de problèmes par couple ou en groupe mais si le maintien par couple est choisi, à la perte d’un des deux partenaires il sera pratiquement impossible de former un nouveau couple avec l’apport du sexe disparu, pour deux raisons. La première c’est simplement parce qu’il faut être certain de pouvoir introduire un géniteur de la même souche (aire de répartition) et la seconde comme chacun le sait introduire un nouveau venu est d’une extrême complexité. Si nous choisissons le maintien en groupe une hiérarchie propre au genre va s’établir. |
Mon expérience personnelle : Il me semble tout d’abord utile de préciser que les éléments apportés dans ce propos n’engagent que moi et fonctionnent bien chez moi. Il peut en être autrement chez certains éleveurs. Les « expériences » tentées sur ce Tropheus n’ont pour but qu’une vérification de certaines affirmations. J’ai eu la chance de pouvoir acquérir il y a un peu plus de deux ans 4 mâles et 12 femelles adultes sauvages, après une période d’acclimatation et de quarantaine sur laquelle j’ai peu de chose à dire. Les Tropheus duboisi “Maswa” ont été placés dans un bac de 1300 litres. Le pH est de 9.2, et la conductivité de 1100µS, je ne mesure aucun autre paramètre. Comme décor une pierre plate posée sur deux tuyaux de 15 cm de diamètre. La filtration se fait sur mousse par des exhausteurs. La température est réglée à 26 °C. La lumière éclaire le bac 14 heures par jour. Je distribue la nourriture une seule fois par jour, toujours la même, le matin. Je fais une changement d’eau de 1/3 du volume chaque semaine avec ajout de sels pour équilibrer mon pH et ma conductivité. Les Tropheus duboisi “Maswa” se sont reproduits dès le mois suivant l’introduction dans le bac de 1300 litres, souvent plusieurs femelles en même temps. Le nombre des alevins récupérés est de l’ordre de 2 ou 3 par ponte, le reste est dévoré par les adultes (et plus tard par les Simochromis diagramma et les Limnotilapia dardenni introduits dans le bac). J’ai rapidement décidé de faire cracher les femelles après 21 jours d’incubation. J’ai ainsi récupéré plusieurs dizaines de jeunes que j’ai fait grossir. On m’avait dit : « Il ne faut jamais faire cracher les femelles, cela donne plus tard de mauvaises incubatrices » c’est faux et plusieurs de mes amis à qui j’ai donné des jeunes peuvent témoigner ; je peux même affirmer qu’il y a un avantage à cette méthode car les jeunes alevins profitent très rapidement d’une nourriture adaptée et grossissent donc mieux. Je sais bien que je vais faire hurler les aquariophiles accrochés aux méthodes naturelles mais je le répète, c’est une constatation. Ayant pas mal de jeunes disponibles, et, à la suite d’une remarque faite par un de mes amis qui élève également des Tropheus et qui se demandait pourquoi les jeunes Tropheus n’avaient jamais le « gros ventre », j’ai testé l’élevage d’une portée en donnant de la nourriture très riche en protéines animales, des artémias et même des vers de vase et effectivement aucun des jeunes élevés jusqu’à une taille de 7 cm n’a été malade. Il serait intéressant de recenser chez les éleveurs les jeunes Tropheus ayant été atteint par cette maladie. |
Le cas du “Stardust” Nous ne pouvions pas terminer cet article sans parler de Tropheus duboisi “stardust” Qui n’a pas rêvé d’avoir dans un bac un groupe de Tropheus duboisi adultes possédant la robe des juvéniles ? Tropheus duboisi “stardust” est issu de sélection naturelle. Dans les étangs d’un éleveur professionnel sur les bords du lac, il a été remarqué que certains jeunes Tropheus duboisi conservaient une robe juvénile assez tardivement, ces Tropheus ont été isolés, gardés, rassemblés, pour arriver à obtenir des adultes gardant le patron de coloration juvénile. Aujourd’hui, ces adultes se reproduisent et sont diffusés. Il n’y a aucune différence dans la morphologie du poisson, pas de manipulation génétique, tout simplement une sélection (NDLR) Le comité de pilotage du groupe Gtroph de l’AFC a souhaité, à l’unanimité, ne pas cautionner ce Tropheus. |
>>> Photos de Tropheus duboisi <<<
>>> Description de Tropheus duboisi <<<
Remerciements à Laurent Bourdelas qui a fait une lecture du texte et à Eric Genevelle qui a bien voulu corriger cet article et qui m’a procuré certains documents.
Hugo Loisel pour ses photos, ainsi que Sébastien Bochenko (BAGADOU).
Bibliographie :
Les cichlidés du Tanganyika dans leur milieu naturel Ad Konings
African Cichlids II Tanganyika I Tropheus Peter Schupke
Dossier Tropheus “Tropheus duboisi” Eric Genevelle (mai 1999)