Cyphotilapia frontosa et gibberosa etc.

Cyphotilapia frontosa et gibberosa etc.

Cyphotilapia gibberosa

Cyphotilapia frontosa & gibberosa

Cyphotilapia frontosa Mpimbwe

Cyphotilapia gibberosa Mpimbwe (Tanzanie)

Photo F&C Toublanc

Article de Eric Genevelle (2000)

(ndlr: nomeclature révisée)

Empereur à la force tranquille, Cyphotilapia frontosa avec sa parure de bagnard blanche striée de noir aux reflets bleutés, le Cyphotilapia  frontosa est connu de tous les Cichlidophiles. Encore peu maintenu en aquarium, les observations à son sujet sont relativement rares, tant sur ses meurs en milieu naturel et en aquarium, que sur les observations relatives à sa reproduction. Pourtant le Cyphotilapia frontosa est un seigneur qui, pêché sous le nom de “Ngumu Ngumu” au bord du lac Tanganyika, reste pour beaucoup le plus majestueux des cichlidés de l’Afrique Orientale.

Description du genre / Milieu naturel / Collecte / Comportement alimentaire /

Comportement social / Maintenance / Reproduction

Description du genre

Un peu d’histoire

Le Dr W.A Cunnington, rapporta en Europe les premiers exemplaires de Cyphotilapia frontosa en 1905 lors de sa 3ème expédition au lac Tanganyika. En 1906, Georges A. Boulenger, un des ichthologues les plus réputés, le décrivit comme Paratilapia Frontosa. En 1915, le même Boulenger le classa comme Pelmatochromis mais, en 1920, C.T. Regan décrivit le nouveau genre Cyphotilapia dans lequel il plaça C. frontosa du lac Tanganyika et C. Demeusii du Zaire supérieur. D.Thys Van den Audenaerde, en 1964, examina quelques exemplaires de C. Demeusii et aboutit à la conclusion que ceux-ci n’appartenaient point au genre Cyphotilapia mais bien au genre Haplochromis, puis au le genre Thorachromis. Le genre Cyphotilapia est donc monotypique.

Super-ordre Téléostéens
Ordre Perciformes
Sous-ordre Percoïdes
Famille Cichlidae
Genre Cyphotilapia
Espèce Cyphotilapia Frontosa

Description du genre (un 6 barres à 7 bandes)

Le genre Cyphotilapia a été décrit pour la première fois par Regan en 1920. L’exemplaire type de l’espèce a été capturé par Cunnington, dans les environs de Kigoma et fait partie de la sous-espèce nordique. Celui-ci, ainsi que le dessin de Boulenger et la majorité des poissons des aquariophiles, porte six barres verticales alors que le spécimen parfois présenté porte cinq barres verticales entre l’opercule et le pédoncule caudal, se différenciant nettement par ce patron. Poll, en 1956, a décrit, pour la première fois, la seconde sous-espèce à cinq barres, avec photos et dessins à l’appui; mais il semble qu’il n’ait pas remarqué que l’exemplaire décrit et représenté par Boulenger, possédait une barre supplémentaire. Pendant longtemps nous les avons appelés “à 6 bandes” et “à 7 bandes”, jusqu’à ce que R. Allgayer nous fasse la démonstration et l’escamotage de la bande oculaire dans le compte; ce qui fait qu’il convient de parler de Cypho à 5 barres et de Cypho à 6 barres. Variétés géographiques Cependant, pour être plus juste, il nous faudrait parler de plusieurs variétés de Cyphotilapia frontosa.

  Cyphotilapia frontosa “Blue Zaire” Entre M’toto et Kapampa (Congo) 5 barres. Race bleue plus marquée que le “Bleu de Zambie”
Cyphotilapia frontosa “Nord Congo” Congo Sur un fond blanc bleuté, il présente 5 bandes verticales sombres. Une 6ème bande, partant du front, traverse l’oeil pour se terminer à la base de l’opercule.
Cyphotilapia frontosa “Burundi” Burundi Sur un fond blanc bleuté, il présente 5 bandes verticales sombres. Une 6ème bande, partant du front, traverse l’oeil pour se terminer à la base de l’opercule.
  Cyphotilapia gibberosa “Kasanga” Kasanga (Sud Tanzanie) Espèce à 5 barres
Cyphotilapia frontosa “Kavalla” Kavalla Island (Nord Congo) Possède 5 barres également et se distingue par ses membranes jaunâtres dans la nageoire dorsale, à l’image du « Kigoma ».
Cyphotilapia frontosa “Kigoma” Tanzanie 6 barres. La barre céphalique est très estompée au-dessus de l’œil, alors qu’en dessous, elle est transformée en tache recouvrant entièrement l’opercule. Les membranes de la dorsale ainsi que de la caudale sont jaunâtres. Forme élancée.
Cyphotilapia gibberosa “Kipili” Tanzanie Variété à 5 barres, dont la particularité est d’avoir à la fois l’opercule noir du «Kigoma» et la barre horizontale entre les yeux du «Zambie». Il pourrait s’agir d’un croisement naturel entre les deux variétés.
Cyphotilapia gibberosa “Mpimbwe” Cap Mpimbwe (Tanzanie) 5 barres, ne dispose sur la tête que d’une bande horizontale entre les deux yeux. Enfin, la principale particularité de cette variété réside dans sa couleur très bleue et virant même sous certains reflets au violet.
Cyphotilapia gibberosa “Sambia” “Bleu de Zambie” Zambie Corps plus haut. Elle présente 5 barres corporelles, et se distingue de la variété du Burundi par la présence d’une bande noire horizontale reliant les yeux. D’autre part, les gros mâles ont la tête entièrement bleu nuit.
  Cyphotilapia frontosa “Congo” Tembwe (Sud Congo) 5 barres. Corps très trapu. Il se distingue du Cyphotilapia frontosa du Nord (Burundi) par le fait que ses bandes verticales ne se prolongent pas jusqu’au ventre.

Morphologie du Cyphotilapia FRONTOSA.

Ce poisson peut être considéré comme un des géants du Tanganyika. Les mâles peuvent atteindre 35 cm (il vous suffira de vous rendre à l’aquarium du musée des arts Africains de la porte Dorée à Paris pour en convenir) pour un poids respectable de 800 gr. Leur bosse violacée peut arriver à la verticale de la bouche et donner au poisson un air de Schtroumpf. Les femelles, plus trapues, restent généralement plus petites et leur bosse plus “féminine”. Il est à noter que les nageoires pectorales et la dorsale se terminent chez le sujet adulte plus en longueur sous forme de filament chez le mâle que chez la femelle. Je considère cependant que la meilleure façon de distinguer les sexes est d’observer leur comportement.

Démarrant légèrement en avant de la dorsale, avec, souvent, une ébauche de tâche blanche, la première des barres noires qui compte descend vers les pectorales contournant l’opercule. La 2ème, 3ème, la 4ème (et la 5ème pour le 6 barres) suivent et prennent naissance dans la dorsale, la dernière ceinture le pédoncule caudal. La nageoire dorsale est un mélange de blanc, de gris, et de bleu, à son bord supérieur, selon la lumière.

Chez les sujets de Zambie bleu, elle se colore de bleu et de fauve (magnifique !). Les pectorales sont bleues pâles et très longues chez le sujet mâle âgé, pouvant même rejoindre la caudale qui est légèrement fendue en son milieu. L’anale est aussi bleu-ciel. L’oeil est grand par rapport à la tête, sombre mais délicatement ourlé d’or. La pupille reste intelligente. Il semble que cet oeil acquiert plus de débattement avec l’âge, peut-être pour garder un certain degré de vision vers le haut, malgré sa bosse (qui est à l’origine de son nom). Quant à sa bouche, elle est énorme et peut engloutir l’équivalent d’une balle de ping-pong.

La mâchoire inférieure peut avancer, ce qui permet à ce poisson d’aspirer la nourriture, même située à quelque distance, en même temps qu’un énorme volume d’eau, sans avoir à se déplacer. Il est étonnant de constater le volume de paillettes ou d’artémias qu’il peut engloutir à chacune de ces aspirations. A noter que dans la nature, la taille des Cyphotilapia frontosa n’atteindrait pas aussi couramment la taille de nos spécimens d’aquarium. La concurrence y est plus rude et le milieu non protégé. L’espérance de vie y est aussi plus courte surtout chez les jeunes par la prédation.

Caractéristiques méristiques
Écailles
32 / 35 en lignes longitudinales
Lignes latérales
2
Dents
Rangée extérieure coniques ou partiellement bicuspides, rangée intérieure coniques ou partiellement tricuspides
Bouche
Inférieure proéminente, grande, pas très puissante
Ouïes
10 /12 arcs branchiaux.
Poids
800 grammes
Longueur du corps
2,5 fois sa hauteur
Le milieu naturel

Rappel géographique

Le milieu naturel de la sous-espèce à 5 barres est nettement plus étendu que celui de la seconde sous-espèce. Les lieux de captures se trouvent aussi bien à la pointe Nord (Burundi) qu'à la pointe Sud du lac (Zambie).
Des Ngumu Ngumu dans les profondeurs
Il est probable que cette répartition s'étende également le long de la côte Ouest appartenant au Congo. Ces poissons sont exclusivement inféodés à la zone rocheuse où les spécimens adultes ont colonisé la zone profonde du littoral rocheux entre 30 et 40 mètres environ. Dans ce domaine, ils apparaissent en très grand nombre. Par compte, ils sont très rares au-dessus de 20 mètres de profondeur. En général, ce sont des sub-adultes qui s'y tiennent en solitaire. En plongée sous-marine, l'aquariophile, surtout celui qui se souvient de l'époque héroïque où ce poisson était très difficile à trouver (10 ans à peine), risquent un arrêt cardiaque devant la population qu'il est à même de rencontrer au fond. Je conseille une descente prudente, surtout chez les personnes sensibles aux oeuvres d'art. Les colonies au-delà des 60 mètres peuvent compter un millier d'individus à certains endroits. La population indigène apprécie aussi le Ngumu Ngumu (ou M'dubu, autre nom local de C. frontosa) mais pour des raisons différentes. Ces individus sont pêchés chaque jour afin de fournir aux habitants leur ration de proteine. Il paraît que leur goût est excélent...(mais vous le goûterez pour moi !) Aucun spécimen pêché ainsi à la ligne n'a une chance de survie. Sans doute par le fait qu'ils vivent à grande profondeur, les Cyphotilapia frontosa semblent avoir moins de besoins en oxygène. Pratiquement, cela se traduit dans nos aquariums par le fait qu'ils toléreront bien une baisse d'oxygène dans le bac, lors d'une panne de pompe par exemple, alors que d'autres poissons seront morts par asphyxie. De même, alors que beaucoup d'autres incubateurs buccaux gagnent les couches plus oxygénées du lac et les rives pour libérer leurs alevins, le Cypho reste dans les couches profondes, y compris pour incuber.
Des imitateurs gourmands
Pour l'anecdote, on retrouve souvent à proximité ou mélangés aux Cyphotilapia frontosa des exemplaires de Perissodus Straeleni, un cichlidé mangeur d'écailles et présentant la même robe que notre bossu. Ces Périssodus arrachent quelques écailles des flancs des frontosa. Leur homochromie est telle avec les ypho que Brichard dit qu'il est impossible de les distinguer si on ne les a pas dans la main. Notons cependant que ceci n'est valable qu'en comparaison avec des sujets jeunes, les Périssodus ne présentant, même à l'état adulte, pas de bosse frontale.
Perissodus straeleni

Perissodus straeleni (Bulu point).

Récupération des sujets sauvages

La technique de la Cocotte

Comme ces poissons vivent en très grande profondeur, ils doivent être accoutumés lentement et avec précaution à la faible pression de la surface. C’est pourquoi, la capture de cette espèce est difficile et dispencieuse. Pierre Brichard, qui depuis 1971, dirigeait une station de capture près du lac Tanganyika, a publié un important ouvrage:

<< Fishes of lake Tanganyika >> dans lequel il nous livre pas mal de particularités au sujet de la pêche de ce poisson. Tout ceci ne nous surprendra pas quand on sait que, avant sa mort, il effectua plus de 2000 heures de plongée à cette activité captivante. Le regretté Pierre Brichard utilisait pour ce faire des sortes de Cocottes minutes d’environ 200 litres qu’il emmenait avec lui au cours de ses plongées. A l’aide d’un anesthésiant contenu dans une grosse seringle terminée d’un tube en plastique de 30 cm, il endormait les spécimens au fond de leur trou. Récupérant ainsi un poisson, il le plaçait dans sa Cocotte qu’il remontait à la surface. A l’aide d’un robinet placé au sommet du récipiant, il laissait passer un peu d’air à l’intérieur afin de ramener la pression interne à 1 bar sous un délais de 24 heures.

Toby Veal

Toby Veal à sa station de collecte

 

Depuis, les techniques de récupération se sont améliorées, mais restent suffisement artisanales pour qu’il soit intéressant de vous le narrer: <On se sert d’un filet d’environ 30 m2, tenu par 4 plongeurs, que l’on promène au dessus d’un banc et contre les rochers à 40 mètres de profondeur.>

Une fois capturés, la technique de la cocotte reste la même car le poisson risquerait de se blesser dans une nasse durant la phase de décompression.

Des soins attentifs

Puis s’ensuivait un long traitement. Après la phase de décompression, chaque poisson est mis à part; ses blessures sont, plusieurs fois par jour, traités à la peinture d’iode tandis qu’une dose élevée de sulfate de cuivre est ajoutée à l’eau de séjour. Après trois jours – l’eau étant renouvellée chaque jour – chaque animal est plongé dans un bain contenant du bleu de méthylène et de l’acriflavine; des antibiotiques et un sulfamide y sont également ajoutés. Pareil traitement dure environ deux semaines avec renouvellement de l’eau tous les deux jours. Quand toutes les blessures sont guéries, il est placé en bac de quarantaine pour une durée de 5 jours et ce n’est qu’après qu’il pourra être livré. Brichard relate encore que, durant cette période, chaque animal est nourri au Tubifex et avec de la nourriture sèche. Un poisson d’environ 20 cm avale quotidiennement une quantité de Tubifex de la grosseur d’une balle de golf. Nous comprendrons ainsi la difficulté qu’il en résulte de vous offrir ces joyaux en bon état. Autant vous dire qu’il est pratiquement impossible de se faire importer un réel couple de ces poissons

Pêcheurs avec C. gibberosa.

 

Comportement alimentaire

En milieu naturel

Cyphotilapia frontosa est classé parmi les ramasseurs piscivores. En effet, malgré sa grande taille, le bossu n’est pas un chasseur poursuivant, il est beaucoup trop lent, ni un chasseur embusqué, il est l’un des poissons les plus voyants dans son habitat. Cependant, l’examen des contenus stomacaux révèle un régime alimentaire piscivore (débris de lamellibranches, de mollusques et de poissons). De plus, la longueur de son intestin (avec une seule anse), de 25 cm pour un sujet de 30 cm, prouve que c’est un carnivore. Il a été déduit, d’après des observations in vitro et in vivo, que le C. frontosa est principalement actif pendant les périodes de faible intensité lumineuse (au crépuscule par exemple). Ses proies peuvent consister d’individus Cyprichromis complètement exténués et séparés de leur banc, et ainsi très facile à capturer, ou encore, et plus probablement, de ces mêmes cichlidés lorsqu’ils sont endormis sur le substrat pendant la période nocturne. Ce type de comportement a pu être observé en aquarium auprès d’alevins de Cyprichromis d’environ 2 à 3 cm. D’une manière générale, les cadavres de poissons sont rares dans les 60 mètres supérieurs de l’habitat rocheux, et il semble que Cyphotilapia frontosa se nourrisse à partir de cette source.

En aquarium

En aquarium, notre hôte accepte toutes les nourritures carnées, avec une prédilection pour les tubifex et les vers de vase que vous lui donnerez en cas de problèmes d’adaptation pour des sujets sauvages. Pour ma part, je leur donne un mélange broyé et congelé composé de crevettes, coeur de boeuf, épinards, filets de lieu noir, moules, coques, amandes, jaune d’oeuf, paprika, et de quelques gouttes de vitamines Biocanina. On prendra soin, de rincer cette mixture à l’eau claire afin de ne pas trop troubler l’eau de votre bac lors de la distribution de nourriture. Quelques artémias et /ou paillettes servant d’apéritif et /ou digestif pourront aussi leur faire plaisir. Il faut cependant veiller à faire quelque peu décongeler cette préparation, nos gloutons aillant la fâcheuse habitude d’avaler directement des blocs congelés d’un volume de 2 ou 3 cm3. Je vous déconseille les nourritures restant en surfaces comme les granulés, car ils mettront un temps fou à aller les chercher tant ils refusent de quitter le fond. La quantité de nourriture à distribuer varie. Alors que les jeunes se “goinfrent” quotidiennement, les adultes observent des jeûnes volontaires de plus de 3 jours. Les fortes chaleurs d’été les font parfois bouder la nourriture, et ils ne mangent que du bout des lèvres en pignochant. La principale raison qui peut pousser notre poisson à peu se nourrir est la présence de poissons trop vifs dans le bac qui lui disputeraient la nourriture.

Comportement social

Comportement interspécifique

C. frontosa est avant tout un cichlidé, donc, un poisson de caractère. Même si ce dernier ne peut être classé parmi les plus insociables, j’estime qu’il est de ceux qui ont le plus de caractère. Si vous le mettez en face d’autres cichlidés autres que son espèce, et pourvu que ces derniers n’aillent pas lui conter misère, il ne leur fera aucun mal, même en période imminente de reproduction. Il reste dans son trou et regarde passer avec bonhomie les autres occupants de son espace environnant.

Cependant, en cas de harcèlement de la part de ces derniers, il saura en garder rancune et se vengera à un moment ou un autre. Soit il “craquera” en envoyant tout promener, votre décor y compris, comme s’il désirait se débarrasser d’un parasite, soit il attendra que vienne son heure pour attraper d’un coup de gueule sa victime sans pour autant vouloir la tuer, simplement pour lui montrer qui est le chef. C’est ainsi que je vis disparaître la moitié d’un Ophtalmo Ventralis dans sa gueule après que ce dernier ait un peu trop longuement gravité autour de l’antre du propriétaire. La victime s’en tira avec une marque verticale de dent qui ne disparu qu’au bout d’un mois.

Vis à vis des poissons un peu trop vifs comme les Tropheus, il est à remarquer que la longueur des nageoires de nos bossus est inversement proportionnelle au nombre de ces “spidés”. A vous d’en tirer les conclusions qui s’imposent. De manière générale, votre C. frontosa sera ravi en compagnie de cichlidés conchyicoles et de Neamprologus. Il en sera de même avec les Lamprologus à l’exception de Variabilichromis Moori, trop vif par nature. Une association avec des Ophtalmotilapia est du plus bel effet et relativement harmonieuse du fait qu’ils n’occupent pas le même espace de nage. Dans certains aquariums, on a pu observer un comportement étrange de nos amis envers des sujets malades ou craintifs. En effet, il arrive que des poissons malades aillent se réfigier dans sa grotte sans que notre sujet cherche à le repousser.

Comportement intra-spécifique

C. frontosa est avant tout un champion de la diplomatie et de la dissuasion. Alors qu’il ne semble ne pas observer de territoire en face d’espèces différentes, il se montre très rigide vis à vis de ses congénères. En guise d’introduction, je vous déconseille de mettre dans votre bac un exemplaire unique de Cyphotilapia frontosa. En quelques heures, il aura vite fait de considérer votre bac comme son territoire. Y ajouter un autre exemplaire serait du suicide et le maître de ces lieux jusqu’alors si discret se transformerait immédiatement en tueur sans compromis. Si vous trouvez dans cette situation, je vous conseille vivement de bouleverser votre décor afin que celui-ci ne reconnaisse pas son territoire et que vos Cyphos se trouvent sur un terrain plus équilibré. Il est moins risqué de placer plusieurs nouveaux pensionnaires en même temps.

Il est conseillé de mettre dans un bac de 2 mètres minimum un seul mâle et une ou plusieurs femelles, cependant, comme il est pratiquement impossible de distinguer les sexes chez de jeunes sujets, vous comprendrez la difficulté de la tâche. Mettre plusieurs mâles dans un même bac n’est possible que si ces derniers aient été élevés ensemble et que le bac soit assez long pour que leurs regards ne se croisent pas trop souvent.

Vis à vis des femelles, qui s’entendent bien entre elles, le mâle ne leur accorde que peu d’intérêt. Je dirais qu’il les tolère en bordure du territoire, mais rarement dans leur repère. Aussi, à moins d’observer le simulacre de la reproduction, il est courant de constater que le couple se tient aux deux extrémités de votre bac. En cas de conflit entre deux sujets, l’attaque est précédée par une période d’intimidation, un des frontosa, allant se frotter en ondoyant le long du corps de son rival en gonflant la gorge. La couleur de sa bosse change alors de couleur et prend une teinte plus translucide. Si un des deux cède le combat, il sort du territoire. Dans le cas contraire les deux sujets essaient de se pousser mutuellement puis l’assaillant passe sous le corps de l’autre et tente de lui mordre les flancs ou les nageoires avec force. Parfois s’en suivent des prises de gueule assez violentes qui ne se terminent que lorsque l’un des deux cède. Ces combats pour une prise de territoire durent parfois plus de 30 minutes, car le perdant à du mal à perdre sa fierté. Il ira penser ses plaies pendant une semaine, puis reviendra à la charge. Dans le cas d’un simple marquage de territoire, un mâle dominant passera son temps à regarder les autres passer en simulant des faux départs pour faire peur à ceux qui passeraient trop près.

La maintenance

Votre bac

Le premier spécimen que l’on a pu observer en aquarium à été importé aux environ des années 40 et installé à l’aquarium d’Anvers. En fait, comme la plupart des grands Cichlidés africains, il n’existe dans les aquariums d’amateurs que depuis une dizaine d’année seulement, d’où la rareté des observations qui lui ont été consacrées. La maintenance des exemplaires adultes ne peut se faire avec succès que dans de très grands bacs qui dépassent 1,50 mètres de long. La taille du bac peut sembler dérisoire par rapport à la taille de Cyphotilapia frontosa, mais cette espèce est très calme et nage peu. Toutefois, si vous désirez que vos sujets atteignent une taille maximale, j’aurais tendance à vous conseiller un bac d’au moins 1000 litres (ce qui n’est pas à la portée de tout le monde).

Le décor

Habitants des zones rocheuses, ces cichlidés nécessitent un décor rocheux où ils trouveront de nombreux abris et refuges et, dont les éléments formeront des écrans afin de délimiter les territoires. Ils apprécient de la même manière les grosses racines qui leur procureront de l’ombre et se dissimuleront ainsi des regards indiscrets. A propos de ces grottes qu’il vous fera construire, celles-ci ne doivent être ni trop profondes ni trop sombre car les Cyphotilapia frontosa, en particulier les grands mâles, risquent de ne plus en sortir et de prendre une teinte plus foncée. Comme pour tous les aquariums du type Tanganyika, il est nécessaire de prévoir, sur le devant le bac, une grande plage sableuse servant à se dégourdir les nageoires.

En ce qui concerne la procédure d’installation de votre bac, il est indispensable de poser les roches à même le fond de votre bac, puis de mettre le sable. Les C. frontosa ayant l’habitude de déplacer des pelletés de sable, vous risqueriez de voir une pierre de plusieurs kilos tomber sur une vitre…
Les plantes ne seront pas utiles et seront de toute manière arrachées si elles leur barrent le chemin. Il est fréquent de les voir arracher des feuilles qui se trouvent su son passage avec un énervement certain. Les seules plantes résistantes à notre ami restent bien évidemment les anubias que l’on coincera entre les pierres.

La qualité de l’eau

La qualité de l’eau requise reste la même que pour tous les pensionnaires du lac Tanganyika. Il est important que votre eau soit dépourvue de nitrate, et à moins d’un goutte à goutte, je vous recommande de vidanger 1/3 de votre bac toutes les semaines en plus d’une filtration égale à 3 fois le volume de votre bac par heure. L’addition de sels reste au bon vouloir de chacun sauf si ces derniers sont des sujets sauvages où dans ce cas elle devient nécessaire. C’est un poisson robuste qui, lorsqu’il est bien acclimaté, peut dépasser la dizaine d’année de vie en aquarium. Il semble peu sensible aux maladies en dehors de mycoses qui peuvent se greffer sur les blessures tégumentaires survenues au cours de combats intra-spécifiques ou sur les exorations au contact des rochers du décor.

Reproduction

Des préliminaires peu démonstratifs

La pariade signe qu’une reproduction est imminente, se passe d’une façon nonchalante et peu démonstrative. Ces poissons sont des incubateurs buccaux et élèvent leurs jeunes en cellule familiale du type maternel. Il ne faut pas espérer observer une reproduction avant que vos sujets atteignent la taille respectable de 18 cm pour le mâle et 15 pour la femelle. Les sujets ont alors environ 2 ou 3 ans. De plus, il arrive souvent que les premières pontes se soldent par un échec, la femelle ne sachant pas garder ses oeufs ou qu’ils soient mal fécondés par un mâle quelque peu inexpérimenté.

Il semblerait que dans le milieu naturel, l’âge de reproduction soit plus précoce. En milieu naturel, aucun comportement territorial n’a été observé, aussi, la ponte peut se dérouler à n’importe quel endroit adéquat. En aquarium, les pontes peuvent se dérouler en différents sites, et différentes occasions, mais une femelle déposera tous ses oeufs dans le même site durant une même ponte. Le site de ponte, généralement préparé par le mâle au cours de ses travaux de ravalement, est constitué d’une dépression dans le sable, ou entre quelques roches, voire un grand pot de fleur. La femelle s’approche du mâle et cherche sa présence. Elle lui donne alors comme des baisers sur le flanc.

Délicatement, le mâle ouvre la bouche pour lui rendre la pareille et toucher la femelle de ses lèvres. C’est un peu comme s’il voulait la pousser. En fait, il l’invite. Ne cherchez pas plus ample pariade amoureuse, elle est des plus sommaire. Si la femelle accepte cette invitation, elle se rend sur le territoire du mâle pour y subir les derniers outrages. Elle présente alors un oviducte blanc, conique, tronqué, bien développé par rapport à sa taille (5 mm).

Processus de ponte

Le comportement de synchronisation, usuel dans ce type d’incubation buccale, semble être grandement réduit puisque le mâle commence à se positionner au-dessus du site de ponte, apparemment sans rituel supplémentaire. Il décharge son fluide séminal avant que la femelle ait débuté le dépôt des oeufs. Chaque lot libéré comprend entre 2 et 10 oeufs que la femelle collecte non pas en se retournant, mais en nageant en arrière, un peu comme si elle faisait le poirier. La femelle peut répéter ce cycle plus de 6 fois sans intervention du mâle. En effet, il semblerait que le sperme soit potentiellement capable de fertiliser les oeufs plusieurs minutes après sa libération. De temps à autre, en particulier lorsque la femelle a été perturbée, le mâle la reconduit dans le nid et en profite pour libérer à nouveau sa semence. Puis, il se tient de nouveau à quelques distances.

La période d’incubation

Le nombre d’oeufs varie entre 10 et 100 en fonction de la fréquence des pontes et de l’âge de la femelle. Les oeufs sont jaune-blanc d’un diamètre variant entre 4 et 7 millimètres.

La femelle garde ses petits en incubation dans un coin de l’aquarium pendant de 25 à 45 jours. Ce temps d’incubation, qui dépend de la résorbtion de la vésicule vitelline, varie en fonction de la température de l’eau. Si par exemple elle est de 28 jours à 27°C, elle sera de 54 jours à 23°C. Si vous désirez conserver le plus grand nombre d’alevins, il est conseillé de faire cracher la femelle au-dessus d’un seau au bout de 30 jours, dès lors que leur poche vitelline est résorbée (25ème jour). Contrairement à la plupart des espèces qui ne mangent pas durant la période d’incubation buccale, la femelle C. frontosa ne cesse pas de s’alimenter. Pour ce faire, elle procède de la manière suivante: Elle lance de sa lèvre inférieure la nourriture quelle trouve sur le sol; tandis que cette nourriture flotte autour d’elle, elle avale très prudemment.

J.P MARTIN, nous faisait la remarque suivante:

<<Je me suis aperçu que lorsque la ponte était terminée, les autres mâles qui jusqu’alors avaient été tenus à distance, s’approchaient de la femelle et la pourchassaient, ce qui avait pour but de lui faire recracher les oeufs. Ces poursuites duraient environ de 2 à 3 heures entrecoupées d’arrêts, ce qui laissait absolument indifférent le mâle avec lequel elle s’était accouplée. Un point plus important est le problème de la cohabitation de plusieurs individus mâles et femelles dans un bac. Après les mâles, ce sont les femelles qui prennent le relai et cela 24 heures après la ponte. Cela va durer plusieurs jours, et là, ce ne sont plus des poursuites mais des intimidations. Une femelle s’approche de celle qui est en incubation, tourne autour d’elle, l’intimide et d’un mouvement brusque lui fonce dessus; l’autre effrayée part dans tous les sens. Malgrès ce remue ménage, aucune femelle n’a recrachée ses oeufs après 4 jours d’incubation>>.

Élevage des alevins

Dans le milieu naturel la femelle ne s’occupe pas de ses alevins et les laches dans les couches profondes du lac. En aquarium, il en est pratiquement de même, ceci dépendant de la quiétude de son environnement. La taille des alevins à la naissance (12 mm à 2 cm) est suffisante pour que ces derniers se débrouillent seuls. Les jeunes présentent une livrée rappelant celle des parents, quoique moins vive. La forme générale du corps est différente de celle de l’adulte puisqu’il est beaucoup moins haut. Ils accepteront immédiatement toutes sortes de nourriture en passant par les paillettes et les artémias. Attention cependant à la nourriture vivante; en effet, certains amateurs ont pu constater la mort de leurs alevins due à la présence de vers dans les intestins. Au bout de 3 mois dans un bac calme, ils atteindront la taille respectable de 4 cm et à 10 mois de 8 à 10 cm, les femelles restant plus petites.

Lors des reproductions, il faudra éviter que les sous-espèces ne se croisent. Les bâtards issuent d’espèces 5 barres et 6 barres portent souvent des patrons de coloration variés:

Les bandes ne sont pas rectilignes.

Des bandes forment des V.

Certains sont normaux à 6 barres.

Certains sont normaux à 5 barres.

Certains portent 5 barres d’un côté et 6 de l’autre.

 

 

 

 

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